S'il ne portait pas costume et cravate, il serait quasiment
impossible de repérer John Winters, 23 ans, comme membre de l'encadrement chez Téléperformance. «Superviseur senior» depuis six mois, il dirige des équipes de téléacteurs et devrait bientôt être promu «responsable d'unité opérationnelle», ce qui revient à superviser des superviseurs. Son profil d'ancien téléacteur passé à l'encadrement a valeur d'exemple dans l'entreprise. «Quand on est motivé et compétent, on peut avancer très vite», commente le jeune homme, avant de rappeler que «tous les dirigeants de Téléperformance sont issus du terrain».
Au pas de course, il fait visiter son domaine, le deuxième étage de l'immeuble, entièrement consacré au télémarketing. Là, à l'étroit dans leur box, des dizaines de téléacteurs, combiné greffé sur l'oreille, rabâchent le même discours à des interlocuteurs plus ou moins captifs. «Pour des raisons d'harmonisation», tous se présentent sous l'identité de Pierre Caron, de Charlotte Fontaine ou de Claude Bertin, ont en moyenne 22 ans et viennent ici quotidiennement, à la sortie des cours. Leurs voix se mélangent dans un brouhaha assourdissant, l'ambiance est proche de celle d'une vente à la criée.
D'un oeil, John surveille sa collègue Carima, superviseuse sur l'opération Atlas (il s'agit, en résumé, de fourguer des cassettes vidéo à des particuliers. Argument choc, ils ne paieront que s'ils en sont satisfaits). La voix haut perchée au-dessus des boxes, sans jamais marquer de temps de