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Libération

Le peuple des hurleurs chassé du Palais. Le Matif, ultime marché du palais Brongniart, passe au tout-électronique.

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publié le 29 mai 1998 à 2h29

Mardi, le palais Brongniart sera plongé dans le silence. Traders et

autres négociateurs, ces «hurleurs» de parquet, auront désertés le temple de la finance, contraints et forcés. Le Matif, principal locataire des lieux, ferme sa criée ­ condamnant au passage 600 emplois ­ et passe sur ordinateur. Un moyen radical de couper court aux grèves qui agitent le Palais depuis l'hiver. Ces arrêts de travail à répétition ayant bien failli envoyer le Matif ad patres en avril, ses dirigeants ne font même pas mine de s'émouvoir: «le peuple de la criée s'est suicidé lui-même».

Les difficultés du marché à terme français, où l'on spécule sur l'évolution des taux d'intérêt ou des monnaies, ne datent pourtant pas d'hier. Fin 1997, la situation était déjà critique: pour la première fois, la société qui gère le Matif, Matif SA, risquait de terminer l'année 1998 sur une perte de 130 millions de francs. En réalité, ce sera bien pire. Selon nos informations, le trou avoisinerait plutôt les 300 millions (plus de la moitié du chiffre d'affaires de Matif SA) si le volume d'échanges de mai se stabilise.

Un vrai choc. Au début des années 1990, ce marché à terme était l'un des plus prometteurs d'Europe. Il faisait jeu égal avec Londres, deuxième place financière au monde, et toisait son concurrent allemand (la DTB), encore balbutiant. Sept ans plus tard, la perspective a changé. Le Liffe anglais et la DTB se sont partagés le gâteau de la spéculation: pour Londres, les taux courts, pour Francfort les taux l