«Cest un quartier populaire qui monte en flèche. Les gens sont cool:
artistes et artisans y vivent. Il y avait quelque chose de lucratif à faire.» Olivier et Bruno, frères de sang de 28 et 31 ans, viennent d'ouvrir les Frangins, dernier café du nouvel eldorado parisien de la soif: le quartier Oberkampf, dans le XIe arrondissement. Sur quelques rues, bars et restaurants se multiplient depuis trois ans, occupant le moindre pas de porte laissé vacant. Tout est parti, en août 1995, d'un café dénommé Charbon et d'un garçon de 32 ans, Olivier, cafetier dans l'âme et amoureux fou du bric-à-brac des brocantes. A l'époque, la rue Oberkampf ressemble à un village de la Creuse à l'heure de la soupe. Le Charbon somnole sous ses décors 1900 cachés par des moutons de poussière et le noir de la vie. Olivier le rachète avec un associé, lui redonne son lustre d'antan (boiseries, fresques, petites loupiotes colorées). «L'idée était de faire quelque chose qui reste vrai, et qui soit beau.» L'élégance surannée du bistrot attire immédiatement les habitants plutôt jeunes du quartier, le flair d'Olivier profite à plusieurs. Les plus fortunés créent des cafés à coups de gros billets pour réinsuffler du cachet à un lieu; les plus ou moins fauchés, petits trentenaires pour la plupart, s'en remettent à leur sens de la débrouille consolidé par des années de service dans les salles enfumées.
«Etre serveur est un métier de chien. Soit on est exploité toute sa vie, soit on monte son propre business.» A 28