Caudebec-lès-Elbeuf, envoyée spéciale.
Droite et digne, elle avance sous la pluie, entre les banderoles, les pétards et les haut-parleurs. Trente-six ans de sa vie, Germaine a fabriqué des piles électriques. Samedi matin, dans les rues d'Elbeuf et de Caudebec (Seine-Maritime), c'était sa troisième manifestation en deux mois. Le comité d'organisation contre les licenciements et l'intersyndicale CFDT-CGT de l'usine Ralston Energy Systems avaient appelé tous les commerçants à une opération ville morte. Salariés, élus, syndicalistes venus de Cléon et d'ailleurs voulaient rappeler leur détermination à lutter contre le licenciement annoncé de 334 des 540 salariés actuellement sur le site. «On ne peut pas fermer une usine qui fait des bénéfices», murmure Germaine.
Ici, au bord de la Seine, la fabrication des piles électriques est une tradition. Comme le textile, qui a fait d'Elbeuf une ville florissante au XIXe siècle. La devise, inscrite sur le blason de la cité drapière, le rappelle: «Tout le monde travaille.» Une devise mise à mal depuis, par les fermetures successives des filatures au cours des années soixante-dix. Née au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et passée de Caudebec à Elbeuf, l'activité des piles est cédée à Wonder, en 1986. Trois ans après, Bernard Tapie revend l'usine à l'américain Ralston Purina. Basé à Saint Louis (Missouri), le groupe vend alors aussi bien de la nourriture pour animaux que des produits diététiques, de la boulangerie industrielle, de l'agric