Il fallait se pincer hier pour s'assurer qu'on ne rêvait pas: côte à
côte à une même tribune, après vingt ans de guerre fratricide, les patrons d'Aérospatiale et de Matra. L'exercice était particulièrement dur pour le premier, Yves Michot, qui a avalé pas mal de couleuvres depuis quelques mois et dont l'avenir à la tête d'Aérospatiale n'excède probablement pas six mois. Il s'est déjà fait imposer par l'Etat Noël Forgeard ex-Lagardère pour la présidence d'Airbus, qui représente sa plus grosse activité. Voilà qu'il doit vanter les charmes d'une alliance industrielle et d'une évolution capitalistique contre lesquelles il s'est battu jusqu'à la fin juin. Le choix de l'hôtel Royal Monceau, pour présenter le nouvel ensemble, en dit plus qu'un discours sur le nouveau rapport de forces entre les deux groupes. A 50 mètres du siège de Lagardère, c'est un des lieux de réunion favoris des «matraciens». Pour Philippe Camus, c'était plutôt le jour de gloire, car la fusion avec Aérosptatiale est la première grosse opération menée par ce quinquagénaire discret qui a remplacé il y a peu Noël Forgeard à la tête de Matra Hautes Technologies. Agrégé de sciences physiques, diplômé de Normale Sup et de Sciences-Po, Camus est entré en 1982 chez Matra, dont il est très vite devenu le grand argentier. Jean-Luc Lagardère est allé jusqu'à lui confier, il y a une douzaine d'années, l'«éducation» entrepreneuriale de son fils unique Arnaud. Aujourd'hui, les trois hommes gèrent le groupe Lagardère su