Amartya Sen vient de recevoir le prix Nobel d'économie 1998
(Libération du 15 octobre) pour ses travaux sur les exclus et la pauvreté. Il donne ici son sentiment sur la crise financière mondiale, qu'il n'estime pas résolue, et regrette les priorités assignées à la Banque centrale européenne (1).
Comment êtes-vous devenu un économiste?
Je suis né en Inde, où les problèmes économiques ne manquent pas. Quand j'avais 9 ans, j'ai eu le malheur d'assister à une famine dans notre région. Près de 3 millions de gens sont morts. C'était une expérience bouleversante, qui a joué son rôle lorsque j'ai commencé à réfléchir à la direction que prendrait ma vie. Plus tard, j'ai étudié la famine en tant qu'économiste et j'ai décidé d'écrire des livres sur le sujet.
Etes-vous issu d'une famille riche?
Non. Je suis issu d'une famille des classes moyennes. Une famille d'universitaires. Mon père était un professeur de chimie connu, et mon grand-père un professeur de sanskrit bien connu aussi. Mais ce n'était pas une famille riche d'un point de vue économique. Les universitaires ont de bas salaires en Inde. C'était une famille où l'enseignement était très important. Je savais donc depuis mon enfance que je serais enseignant" Vous vous apprêtez à publier deux livres «le Développement comme liberté» et «Liberté, rationalité et choix social». Quel est votre propos?
Qu'il ne faut pas comprendre le développement uniquement comme un accroissement du revenu par tête (ou de tout ce qui est lié au revenu). La