On se croirait dans un jeu vidéo. Votre univers: une entreprise à
laquelle vous consacrez vos journées et une bonne partie de vos nuits. Votre mission: améliorer vos conditions de travail. Première tentative, frapper à la porte du service du personnel. Vous arpentez les bureaux paysagers, mais vous ne le trouvez pas. Il faut relire les règles: les ressources humaines sont gérées service par service. Vous cherchez alors un syndicat ou un délégué du personnel. Eux aussi sont inexistants. Alors, vous mettez au point une «bombe»: déverser sur un site web la somme de vos mécontentements, de façon anonyme, à l'insu de vos chefs.
«La bombe a explosé», annonce hier matin le responsable de l'opération. Albert (pseudonyme de rigueur) est employé à Ubi Soft. Il travaille à des projets de jeux vidéo, activité unique de l'entreprise française. Cette fois, la bombe n'explose pas à l'écran d'un CD-Rom, mais dans un millier de boîtes aux lettres électroniques. Sous la forme d'un message envoyé hier matin aux médias et à toutes les unités et filiales à l'étranger du groupe de jeux vidéo: «Des employés d'Ubi Soft lancent aujourd'hui le premier syndicat virtuel: Ubifree ["], une alternative à l'absence de structure sociale au sein d'Ubi Soft.» En fin de matinée, les employés se sont jetés sur les pages (1). Un «moment d'euphorie», dit l'un d'eux. Ils découvrent alors un tableau cru de leur entreprise, laquelle se voit reprocher un fonctionnement monarchique fondé sur l'allégeance aux cinq frè