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Interview

Les politiques de gauche sont-elles solubles dans la monnaie unique? Trois économistes proposent leurs scénarios. Jean-Paul Fitoussi: «La disparition des alibis»

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publié le 4 janvier 1999 à 23h23

Jean-Paul Fitoussi est président de l'Observatoire français des

conjonctures économiques (OFCE).

J'inverserais les termes de la question: «Est-ce que les gouvernements qui souhaitent poursuivre une politique de gauche ont encore un alibi pour ne pas le faire?» La réponse est non. Ils sont au pied du mur. Car ils n'ont plus rien à prouver au marché des changes puisqu'ils échappent complètement à leur tutelle. Ce qui nous a tant fait souffrir, à savoir la volonté de rassurer les marchés des changes sur la conviction anti-inflationniste des gouvernements, vient de disparaître avec l'euro. Pratiquement, cela signifie la fin des taux d'intérêt exorbitants. Il n'y a donc plus de raisons de retarder la lutte contre le chômage. Certes, certains se réfèrent aux contraintes du pacte de stabilité, mais il faut bien comprendre que cette contrainte est de nature radicalement différente de celle des critères de Maastricht. A la fois pour des raisons objectives et des raisons politiques. Objectives d'abord: l'enjeu associé au pacte de stabilité est une sanction financière éventuelle décidée politiquement, donc sans automatisme. Alors que l'enjeu du non-respect des critères de Maastricht était l'exclusion de la monnaie unique. Politique ensuite: l'interprétation du pacte de stabilité dépend de l'inspiration doctrinale des gouvernements. Des gouvernements très conservateurs peuvent l'interpréter comme une contrainte à satisfaire au jour le jour. Mais des gouvernements à tendance socialiste d