La Poste met au point une machine capable de trier la tournée du
facteur. Cette machine sait par exemple qu'il faut servir la rue des Rosiers avant la rue des Bleuets, et le n° 22 avant le n° 24 et classe le courrier en conséquence. En jargon postier, elle fait du «coupage» et du «piquage». Elle n'en est pas encore à mémoriser toutes les boîtes aux lettres d'un même immeuble pour ranger le relevé de compte bancaire de M. Dupont avant la facture EDF de Mme Michu (mais cela, même le facteur ne le fait pas). Cette surdouée du classement a été baptisée Tabou par les chercheurs qui l'ont accouchée dans les bureaux nantais du SRTP (service de recherche technique de la Poste). En développé, Tabou signifie «Trieuse automatique de bureau pour l'ordonnancement unitaire». En condensé, il donne une idée des précautions dont s'entoure la direction de l'établissement pour introduire cet engin qui va révolutionner la vie du facteur. Discrétion. Depuis quelques mois, un prototype fonctionne à Sartrouville, dans les Yvelines. Discrètement. L'expérimentation a été brièvement annoncée dans Jourpost, la publication interne du groupe. Pour ses adhérents, le syndicat SUD s'est fait un devoir de compléter le portrait officiel de la nouvelle trieuse. «Sacrée Tabou. Elle coupe, elle pique, elle trie, elle compte" Bref, elle fait presque tout pour nous. Elle est rapide, performante, rentable et, surtout, elle ne sera jamais enceinte, jamais râlante, jamais contrariante. Et elle, elle ne fera jamais