Au Crédit Lyonnais, le pire est toujours sûr. Après les frasques de
son président, Jean-Yves Haberer (50 milliards de francs de pertes), l'absurdité des plans de sauvetage mis en place après son départ (50 milliards supplémentaires), voici que se profile une nouvelle catastrophe à 70 milliards. Elle a pour théâtre les Etats-Unis, terre d'aventures financières mais aussi du juridisme le plus pointilleux. La justice américaine s'est emparée du démontage de l'un des plus hauts faits d'armes du Lyonnais: le rachat, en 1991, d'un portefeuille de junk bonds (littéralement: «obligations pourries»). Opération qui a fait la fortune de la banque et de quelques-uns de ses partenaires. L'un après l'autre, les acteurs et témoins français sont en train de passer aux aveux. Voici comment ce qui fut qualifié, à l'époque, de «deal of the year», est en passe de devenir l'un des drames judiciaires de la décennie.
D'abord, un personnage: Jean-François Hénin. L'ancien directeur général d'Altus, filiale controversée du Lyonnais, a ainsi défini sa stratégie: «Fouiller les poubelles de l'économie de marché.» A Wall Street, les déchets ont un nom: junk bonds. Des obligations à haut rendement, émises par des entreprises en difficulté. Ces titres financiers réagissent avec une violente amplitude soumise à la conjoncture. Quand ça va mal, les sociétés tombent en faillite et les junk bonds valent moins que rien. Mais, lorsque l'activité redémarre, c'est le jackpot assuré. Pour tirer le meilleur parti de