Pendant longtemps, les chimistes ont été méprisés par les «seigneurs
du pétrole». Le contre-projet de Philippe Jaffré, qui vise à créer un pôle chimique indépendant du pétrole, pourrait bien consacrer leur fierté retrouvée. Dans les années 60, Elf avait créé des unités chimiques simplement «parce qu'on ne savait pas quoi faire des restes du pétrole», explique Jean Conan, de la CGC. Les pétroliers ont l'habitude de traiter avec condescendance leurs homologues de la chimie. L'histoire est fameuse chez Elf Aquitaine: les employés de la raffinerie de Feyzin (Rhône) s'entendent mal avec les chimistes d'Elf Atochem, la filiale spécialisée dans la chimie, qui fabriquent du PVC avec leurs produits. Sale réputation. En 1983, le renforcement du pôle chimie, avec l'arrivée d'ATO et Chloé (rachetés à Rhône-Poulenc), n'y a rien changé. «On a récupéré une chimie dont on ne voulait pas», explique un pétrolier. Face aux pétroliers qui courent aux quatre coins du monde pour découvrir de nouveaux gisements, les 75 000 chimistes sont bien ternes. De plus, ils traînent une sale réputation: leur métier est dangereux et polluant. «Depuis toujours, on est les mal aimés», raconte l'un d'eux. Complémentarité. Pourtant, les cycles opposés du pétrole et de la chimie les rendent très complémentaires: quand l'un est en crise, l'autre marche bien, ce qui permet à Elf de rester une entreprise rentable. Néanmoins, certains sont séduits par la séparation des activités en deux entreprises. «Dans la chimie