Clermont-Ferrand, envoyé spécial.
Les blouses bleues n'en reviennent pas d'être si nombreuses sur la place des Carmes, devant l'usine mère des établissements Michelin. 1968? 1988? Chacun cherche à quelle occasion un débrayage a été aussi bien suivi. Les 3 000 personnes qui défilent les mains dans les poches ne représentent qu'une partie des 14 500 salariés clermontois. Mais les ouvriers de l'équipe du matin ou de l'après-midi décrivent, ravis, les bâtiments qu'ils ont laissés vides ou quasiment derrière eux. 60% des ouvriers des trois équipes auraient débrayé hier dans les quatre usines Michelin de la ville. «Des ateliers ont suivi comme un seul homme», s'enthousiasme Sylvie Barbarin, élue CFDT. Emerveillée et soulagée. La veille, les syndicalistes se repassaient le film catastrophe si souvent joué à Clermont: une mince délégation syndicale défilant dans les rues de la ville et la direction qui se frotte les mains en se disant: «C'est gagné!»
Stigmate. Remuer les Michelin, c'est dur, explique Sylvie Barbarin. «On a fait le tour des bureaux d'études. On sentait bien l'envie de sortir chez de nombreux collègues. Mais ils ont toujours peur. Débrayer, chez Michelin, c'est accepter de porter une croix rouge jusqu'à la fin de sa carrière.» Pour faire sortir ainsi ses salariés, il a fallu que Michelin pousse le bouchon un peu loin. Comme en 1988, lorsque la grève avait soudainement pris. La direction avait alors proposé une misérable augmentation de 20 centimes par heure. Aujour