Il n'a rien de concret à vendre, juste son image. Bob Young, patron
de Red Hat, porte des chaussettes rouges et aime les montrer en soulevant le bas de son pantalon. Les chaussettes, «c'est pour me porter bonheur», dit-il. Et le chapeau de la même couleur dont l'entreprise tire son nom, c'est le couvre-chef favori de Marc Ewing, le cofondateur de l'entreprise.
L'entreprise distribue depuis 1994 le système d'exploitation (1) Linux, concurrent direct du Windows de Microsoft. A la différence du groupe de Bill Gates et de la plupart des éditeurs de logiciels, Red Hat cultive un paradoxe très symbolique de l'économie de l'Internet aujourd'hui: elle ne possède pas le produit qu'elle vend, puisque Linux est l'oeuvre collective de centaines de programmeurs bénévoles dans le monde, motivés par la gloire, ou la seule envie de concevoir un logiciel performant. Ainsi, Linux, créé en 1991 par le finlandais Linus Torvalds, est disponible gratuitement. Et surtout, ce logiciel, symbole de «l'économie du don» typique du Net, est libre de droits: tout un chacun peut le copier, le modifier. Voire le revendre, comme le fait Red Hat.
Grâce à cette particularité, la firme n'emploie qu'un tiers de ses 200 employés à la technique. Contre plusieurs milliers de programmeurs chez Microsoft qui concoctent les versions successives de Windows, farouchement protégé par des batteries de brevets. Le modèle économique de Red Hat a séduit Intel, le numéro un du microprocesseur, et IBM, qui ont investi dans l'en