Il est assez rare que les économistes cèdent à des accès de rêveries
voluptueuses. Pourtant, si l'on en croit les titres de leurs bulletins de conjoncture de cette fin d'année, il y a de quoi se demander s'ils n'ont pas collectivement adhéré à une secte, l'Eglise de la douce croissance retrouvée. Hier, l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) présentait dans son bulletin ses prévisions pour 2000 sous des titres zéphyriens: «Sur un nuage» (conjoncture internationale) et «toutes voiles dehors» (conjoncture française). Il y a quelques jours, la banque américaine JP Morgan présentait une étude baptisée «French economy now in stratospheric heights» (l'économie française désormais à des hauteurs stratosphériques). Les banques françaises, qui avaient un peu surestimé le «trou d'air» lié à la crise asiatique, se bousculent pour réviser à la hausse leurs prévisions, décrivant maintenant une situation «exceptionnelle», «euphorique», «robuste»" La crise des pays émergents est surmontée et la production redémarre en Europe autour d'un axe inattendu Paris-Madrid. Sur la carte du monde (lire page suivante), seul le marasme japonais fait tache, tandis que le risque d'un krach à Wall Street inquiète un peu. «Le ciel est d'un bleu incomparable, avec un cumulonimbus pas très gênant, Wall Street, et, au fond du décor, un gros nuage désespérément noir sur le Fujiyama», résume Philippe Chalmin, l'économiste d'Euler-Sfac, l'un des rares optimistes de la première heure.
En France,