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Interview

Robert Castel, sociologue, ne croit pas au travail individuel.«Les prédictions sur la fin prochaine du salariat étaient stupides»

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publié le 19 novembre 1999 à 1h40

Robert Castel est sociologue, directeur de recherche à l'Ecole des

hautes études en sciences sociales. Il a publié notamment les Métamorphoses de la question sociale (1).

Quatorze millions de salariés dans le secteur privé: le salariat peut-il encore grossir?

C'est déjà pas mal. Si on ajoute les 6 millions environ de salariés du public, on arrive à un chiffre impressionnant: plus de 20 millions de personnes, soit environ 86% de la population active. Cela montre la stupidité des prédictions sur la fin prochaine du salariat.

Le travail individuel n'a donc plus d'avenir?

On a vu disparaître les petits commerçants et les agriculteurs. On ne voit pas ou peu, dans les statistiques, arriver de nouvelles formes de producteurs indépendants. Il y a tout juste un frémissement sur les créateurs d'entreprises et c'est donc une forme transitoire. A l'étranger, hors Grande-Bretagne et Etats-Unis, c'est encore plus vrai: la mondialisation des échanges provoque la destruction de l'artisanat au profit du salariat. C'est particulièrement net lorsqu'on observe les «dragons» asiatiques. La Corée du Sud est passée en vingt ans à un niveau comparable à celui des nations occidentales.

Pourtant, le débat existe bel et bien.

On confond le salariat lui-même et sa forme. Nous avions auparavant une forme «solide» de salariat, protégée par des garanties collectives. C'est encore la forme dominante, qu'il s'agisse des fonctionnaires, des personnels à statut ou des employés du privés. Depuis vingt ans, on assiste