Ah, elle doit se sentir fière, Karen Bertiger! Elle va pouvoir
figurer dans le Guinness Book des records, pour le sarcasme le plus coûteux du monde: 5 milliards de dollars, soit 42 milliards de francs, partis en fumée. Presque la cagnotte Jospin.
C'est en effet une pique contre son mari qui est à l'origine du projet Iridium. En 1985, en vacances sur une plage des Bahamas, elle tente de passer un coup de fil de son téléphone portable, objet encore rare. En vain: on est bien loin de la zone de couverture du réseau. Karen se moque de son mari, Bary, qui est l'un des dirigeants de Motorola, grand groupe américain d'électronique et de téléphonie. Vexé, Bary réfléchit au problème: peut-on trouver un système qui permettrait de téléphoner de n'importe quel point du globe, y compris du milieu du Pacifique ou du désert de Gobi? Il se dit que le seul moyen d'y parvenir est de mettre en place un relais de satellites. De retour au boulot, à Phoenix, Arizona, il en parle. Avec deux ingénieurs, Ray Leopold et Ken Peterson, il travaille l'idée. Deux ans plus tard, les trois hommes proposent à Motorola leur concept: une constellation de 77 satellites en orbite basse (780 kilomètres). D'où le nom d'Iridium, 77e élément de la table de Mendeleïev (1).
Folles promesses. En 1990, Motorola présente son projet au monde, lors d'une conférence simultanée à Pékin, Londres, Melbourne et New York. Pour 3 dollars la minute, promet-il, il sera bientôt possible de téléphoner de partout dans le monde. Le proje