Birmingham, envoyée spéciale.
«N'accepte pas une place chez Rover, quel que soit le salaire, dans dix ans, tu vas te retrouver plus souvent en grève que derrière les carrosseries.» Son père l'avait pourtant prévenu. Mais à l'époque Joe Clark, 32 ans, avait préféré ne pas suivre les conseils du paternel, aveuglé dit-il, par le salaire très alléchant offert en 1988 aux 1 500 recrutés.
«C'est drôle mais il avait raison mon vieux», avoue ce syndicaliste. Samedi, les deux hommes étaient au coude à coude dans la manifestation de Birmingham à laquelle ont participé 80 000 personnes venues de tout le Royaume-Uni pour soutenir les «Rover» récemment cédés par BMW à une société de capital risques, Alchemy Partners. Près de 300 organisations syndicales de tout le Royaume-Uni ont envoyé des délégations pour participer à la marche dont la destination finale était Longbridge, le site qui accueille depuis plusieurs décennies la plus grosse entreprise automobile du pays. Neuf mille salariés y sont employés. «Cette manif, j'en rêvais même la nuit. Je m'en foutais de faire le pied de grue devant les supermarchés pour essayer de convaincre les gens de venir nous aider», affirme Joe Clark qui fait partie des six représentants syndicaux de Rover, à avoir été détachés à plein temps pour gérer les acquis des employés avec la direction. Car dans cette région des Midlands, personne ne se fait beaucoup d'illusion sur la capacité du gouvernement britannique à convaincre BMW de revenir sur sa décision.