Retour de la croissance
La radicalisation des conflits sociaux de l'été est étroitement liée au retournement de la situation de l'emploi. Dans les années 90, quand les indicateurs économiques sont au plus bas, les restructurations se succèdent dans une relative apathie : les salariés ont intégré la notion de crise. Il y a une sorte d'acceptation fataliste du chômage. C'est douloureux, mais c'est le prix à payer. «Pendant la récession, les gens étaient dans une position de soumission économique. Ils ne disaient rien de peur d'être les premiers licenciés», dit Rachel Beaujolin, chercheur en économie (1). La reprise provoque un retournement, remonte le niveau des exigences. On veut bien être victimes de la crise, mais pas être exclus de la croissance. Après des années d'autocensure et de refoulement, la parole se libère, forcément violente. «La violence, dit Rachel Beaujolin, est à la hauteur de tout ce que les salariés ont subi durant les années de crise. Par cette violence, ils disent : "On en a ras le bol."»
Mensonge et trahison
Quatorze plans sociaux en quatorze ans: avant la fermeture de leur usine cet été, les ouvriers de Cellatex ont vu se succéder dépôts de bilan et repreneurs qui tous leur affirmaient qu'ils ne perdraient pas leur emploi. Le mensonge fait partie de tout conflit social et décuple la violence. Lorsque tout s'effondre, les salariés réalisent qu'ils ont laissé partir leurs collègues, ont accepté les pires compromissions, pour rien. Ils se sont fait rouler dan