Dans un grand appartement parisien, deux cabinets dentaires se côtoient. Dans le premier, Philippe, le père, reçoit des patients depuis plus de trente ans. Dans le second, Isabelle, sa fille, installée à ses côtés depuis cinq ans. Entre les deux, Michèle, la mère, assiste son mari, et Gilles, le fils, officiellement dentiste dans un an. La famille D. (1) a contracté le virus du dentiste. «Mes deux enfants ont baigné dedans, mais je ne les ai pas encouragés, se défend le patriarche. Je leur ai dit au contraire que la profession était sinistrée.»
Rien n'y a fait. Isabelle, la trentaine, fait remonter sa vocation à l'enfance. «Grâce à mes parents, j'ai découvert le métier sans douleur. Généralement, les dentistes inspirent une certaine répulsion. Moi, à 6 ans, je jouais avec les pipettes et les turbines de mon père. Tout cela était très ludique.» Sa fille Alice, bientôt 3 ans, a l'air de penser la même chose: elle se précipite en courant pour aller s'asseoir sur le fauteuil de sa mère... Isabelle reprend: «J'avais l'impression que mon père prenait les gens dans ses bras pour les soigner, j'étais très jalouse.» A quoi tient une vocation, finalement...
Celle de Gilles, son petit frère (26 ans), fut plus tardive. Ses parents le voyaient dans le commerce, lui non. «Le commerce est un monde de requins. Il y a dans le métier de dentiste une dimension de service qui m'a toujours attiré. Alors un jour, j'ai pris mes parents entre quatre yeux, je leur ai dit: "je veux devenir dentiste." U