«Cinq brouettes de sable du Loir, du bien jaune et bien épais, pour deux de chaux blanche et 25 kilos de ciment blanc. Je vous donne la recette de l'enduit à l'ancienne, mais surtout ne le dites pas à mes fils.» La bouille toute ronde d'Alexis Gouas, 63 ans dont quarante dans le bâtiment, s'empourpre comme s'il avait trahi un secret de famille. Lui le maçon, qui, pendant des années, a travaillé avec son frère jumeau, a passé la main, voilà trois ans, à ses fils, Francis et Franck. Malgré la retraite, Alexis n'a jamais vraiment décroché, présent sur les chantiers, son univers, sa famille.
«Bouillasse». Francis, son fils aîné, lui doit sa vocation : «Je le voyais rentrer du boulot dégueulasse, j'aurais dû avoir de la répulsion. Mais non, j'ai toujours été attiré. A 8 ans, je l'ai vu monter un mur de moellons. J'ai trouvé ça tellement beau que j'ai voulu faire pareil. J'ai commencé à fabriquer de la bouillasse pour mimer l'enduit et je n'ai plus arrêté. Il m'apprenait les bidouilles quand, gamin, je le suivais sur les chantiers.» L'autre, le cadet, se souvient d'abord des retours du père le soir, à point d'heures, bourré pour tenir le coup, comme il disait, après des quinze à dix-huit heures de chantier, les mains calleuses des centaines de parpaings montés un à un. Ah! il a gagné des millions, l'Alexis, mais à quel prix...
Alors Franck a d'abord tenté d'échapper à l'emprise du bâtiment. Il avait choisi la pâtisserie, un monde bien lointain d'éclairs et de religieuses. Mais une g