L'Europe est tout entière en état d'alerte pour empêcher la fièvre aphteuse d'arriver sur le continent. Pourquoi cette maladie, longtemps tolérée, est-elle perçue comme un tel péril ? Entretien avec Pierre Rainelli, économiste et directeur de recherches à l'Institut national de la recherche agronomique.
Cette épizootie est-elle très différente des précédentes?
Oui, parce qu'elle survient dans un contexte tout à fait inédit d'un point de vue aussi bien biologique, économique, politique que psychologique. La principale originalité de cette épizootie qui est circonscrite actuellement à la Grande-Bretagne, la maladie n'ayant pas été détecté sur le continent est qu'elle menace une population animale totalement vulnérable à la maladie. Les bovins, ovins et porcins du continent n'ont aucune immunité contre ce virus, et cela est sans précédent. Avant la mise au point du vaccin dans les années 50, la maladie était endémique, les foyers fréquents. De fait, au moins une partie des animaux étaient immunisés parce qu'ils avaient eu la fièvre aphteuse, maladie non mortelle généralement. Ensuite, de la fin des années 60 jusqu'en 1991, la plupart des pays de la Communauté européenne vaccinaient chaque année leurs bovins. Les bêtes avaient donc des anticorps leur permettant d'affronter une éventuelle fièvre aphteuse apportée par les petits ruminants et les porcins, lesquels n'ont en revanche jamais été vaccinés, et cela pour des questions économiques. Le Royaume-Uni, lui, n'a jamais vaccin