Geneviève est professeur d'allemand dans un établissement d'enseignement privé.
«J'ai toujours l'impression d'être en sursis. Malgré mon contrat à durée indéterminée, mon plein temps, je ne me sens pas sécurisée. En septembre par exemple, j'ai reçu un planning avec moitié moins d'heures de cours que ce que je faisais jusque-là. Deux mois d'absence, et voilà qu'il faut remonter au créneau comme une débutante. S'obliger à expliquer, après quinze ans de maison, qu'un temps partiel ça ne permet pas de vivre et d'élever seule trois enfants. Passer quelques semaines le couteau entre les dents et la peur au ventre... et s'il ne cédait pas?
«Le directeur a si souvent usé de la méthode: "Désolé, on n'a pas plus d'heures à vous proposer", pour virer des gens ou les acculer à la démission que j'ai craint le pire. Parce que c'est plus fort que lui, il est persuadé qu'on lui coûte trop cher. Qu'on devrait être payé à l'heure et pas au mois, encore moins pendant les vacances scolaires. D'ailleurs, jusqu'à récemment, il nous mettait en chômage technique pendant les mois d'été. Et puis il s'est fait épingler. Et on est tous passés salariés... sauf qu'il y a pas mal d'autres boîtes de formation où les intervenants sont payés à l'heure. Alors, nous, on passe pour des privilégiés. Au royaume des aveugles, comme on dit, les borgnes sont rois.
«Il ne le supporte pas. Régulièrement, il tente de rogner sur nos salaires. Il profite des négociations 35 heures pour ressortir ses vieux fantasmes, nous fa