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Libération

Jean-Louis Breton, 38 ans «On craint d'être mangé à la sauce du toujours moins cher»

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France. Conducteur à Strasbourg. Engagé en 1983. 12 500 F mensuels net, primes comprises (1 906 euros).
publié le 29 mars 2001 à 0h14

«Avec la concurrence, on craint d'être mangé à la sauce du toujours moins cher, ce sera le dumping social. Quand on parle avec des conducteurs allemands, suisses ou luxembourgeois, ils envient notre statut, c'est évident. Ils gagnent plus, mais on les bouge comme des pions, on les cantonne dans une activité, on en fait ce qu'on veut...

L'ouverture à la concurrence, c'est surtout un danger pour la sécurité. Pour gagner plus de fric, les opérateurs ferroviaires feront comme sur la route, où certains patrons filent des enveloppes aux chauffeurs pour payer les excès de vitesse. Produire de la sécurité pour les voyageurs, ça ne se voit pas, mais c'est coûteux dans la formation du personnel, dans l'entretien des voies. Quand on voit ce qui se passe chez les Anglais... franchement. Chez nous, tout est fait pour nous maintenir à un certain niveau: on a quatre jours de formation continue par an, on reçoit des accompagnateurs impromptus pour nous tester, simuler des pannes fictives, nous faire réagir. Partout, il y a des impératifs économiques, chez nous aussi, mais on ne va pas au-delà d'une certaine limite: la bible, c'est la sécurité. La concurrence, c'est prendre un conducteur hongrois d'une société luxembourgeoise et lui faire traverser la France. Ils n'ont aucune connaissance des lignes, aucun point de repère, c'est dangereux. Nous, on connaît nos lignes, les situations de travaux, les endroits où arrêter le train en cas de panne pour être plus facilement dépanné. Je pense sincèr