«Ma cliente attend un heureux événement, monsieur le président. L'autorisez-vous à rester assise?» Le président du conseil des prud'hommes de Paris, section commerce, regarde la plaignante d'un air bienveillant. «Je vous ordonne de rester assise», dit-il en souriant. Mais Virginie ne sourit pas. Assigner son ex-employeur devant les prud'hommes n'est jamais chose facile. Son avocat, debout à la barre, se charge d'exposer son cas en dix minutes, pas une de plus. La justice du travail est assez expéditive; l'affaire est généralement jugée dans la journée. Jusqu'en octobre dernier, Virginie était comptable dans une société de routage. L'entreprise périclitait. Sa gérante a commencé par ne plus lui verser de salaires puis, par souci d'économies, a transformé son CDI en CDD («du jamais vu!», s'exclame le président) avant de la licencier sans entretien préalable. «Elle a totalement paniqué, résume l'avocat. Et ma cliente est toujours au chômage. Enceinte, elle n'est pas près de retrouver du travail.» L'entreprise est condamné à payer les salaires (31 000 francs) et des indemnités (30 000 francs) pour rupture abusive de contrat.
Deux étages en dessous, la salle des référés voit passer les affaires en urgence. «Le code d'accès est CANARD», lâche Gérard dans un souffle. Le tribunal vient de le contraindre à dévoiler le mot de passe de son ordinateur professionnel. Il est accusé par sa direction d'avoir embarqué une partie du fichier clients. Lui rétorque qu'il n'a pas touché son dernie