Politologue, Paul Ariès a travaillé sur les sectes et le monde de l'entreprise. Il a notamment mené une étude sur McDonald's (1).
Pourquoi une tenue est imposée dans certains secteurs, alors que rien ne la justifie professionnellement ?
Traditionnellement, l'uniforme a une fonction de protection (vêtement antifeu pour les pompiers) et de signalisation (casquette pour le facteur). Aujourd'hui, il est aussi devenu un outil de management qui sert à intégrer le salarié, à le faire adhérer à la culture maison. Cette culture d'entreprise passe par la tenue, mais aussi par le port du badge, le tutoiement, l'usage du prénom. L'entreprise a tendance à croire qu'elle a un droit de regard toujours plus grand sur la vie de ses salariés. En imposant un langage ou une image maison, elle ne leur demande plus seulement de bien travailler mais d'être heureux de le faire, ou du moins, de faire semblant.
L'uniforme se propage, alors que de plus en plus de salariés peuvent venir en tenue plus décontractée («Friday wear»)? Est-ce contradic toire?
Le Friday wear est aussi une forme d'uniforme. Vous avez une tenue du lundi au jeudi, puis une autre codifiée le vendredi. Des lignes de vêtements ont été conçues pour ce dernier jour de travail. Mais cette démarche est hypocrite. C'est une fausse décontraction, qui tend à rapprocher de façon perverse la sphère professionnelle de celle du privé.
Imposer un comportement fragilise-t-il les salariés ?
Quand vous appelez une personne pas son prénom, ce n'est plus