Sergueïev Possad, Koursk
envoyée spéciale
Ils s'appellent tous les deux Alexandre. Tous deux sont fils de kolkhoziens et tous deux vivent de l'agriculture. C'est tout ce qu'ils ont en commun. A 54 ans, le petit paysan privé Alexandre Goussev végète sur ses six hectares dans la région de Moscou. A 28 ans, Alexandre Tche tverikov prospère en vrai chef d'entreprise à la tête d'un holding agroalimentaire reposant sur quelque 63 000 hectares dans la région de Koursk, à 500 kilomètres au sud-ouest de la capitale.
Petites fermes et grandes propriétés sont nées de la réforme inachevée de l'agriculture lancée en 1992 par l'ancien président Boris Eltsine. Et paradoxalement, alors que la Russie célèbre ces jours-ci les dix ans de la fin du communisme (lire page 7), la recomposition de la terre née de cette réforme ambiguë s'apparente plus à «une recollectivisation» de l'agriculture. En théorie, la vente et l'achat des terres agricoles ne sont toujours pas autorisés. Les rédacteurs du nouveau code foncier, récemment ratifié par le gouvernement, ont volontairement laissé de côté cette question pour ne pas s'aliéner, au Parlement, les voix des adversaires du marché libéré des terres agricoles. Ceux-là disent qu'ils redoutent la constitution de latifundia, autrement dit de grandes propriétés foncières. Mais dans le vide juridique actuel en Russie, celles-ci se sont déjà constituées. C'est même un secret de polichinelle. Dans son adresse annuelle au Parlement, le président Vladimir Poutine a l