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Libération

A la ville, l'usine n'a plus le droit de cité

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Fermer les sites polluants, mais pour les mettre où?
publié le 29 octobre 2001 à 1h24

«On est des dinosaures.» Les ouvriers de l'usine AZF de Toulouse le sentent bien. Ils ne sont plus de leur temps. L'explosion qui a ravagé leur usine chimique et une partie de la ville est bien plus qu'un dramatique accident industriel. Elle marque une nouvelle ère dans la cohabitation entre les usines polluantes et les villes. Autrefois bienveillant, puis contraint, ce voisinage est devenu subitement insupportable. Et aujourd'hui, les riverains qui se montent en associations, en collectifs, savent que les politiques, à commencer par le président de la République, sont prêts à suivre leurs revendications, au moins sur la chimie. Et à demander la disparition de ces usines.

Le processus a été lent, mais inéluctable. Autrefois, l'usine était acceptée, malgré la pollution, malgré les désagréments parce qu'elle faisait travailler beaucoup d'habitants des localités voisines. AZF, à ses débuts dans les années 20, employait près de 3 000 salariés. Ils habitaient aux alentours, dans des cités ouvrières, comme la cité Papus en face du site. Ces ouvriers sont les premiers à subir les nuisances de l'usine, la puanteur, le bruit. Mais les acceptent, parce que c'est leur travail et parce qu'ils sont logés, envoient leurs enfants à l'école et en vacances grâce à l'usine. Dans ce système paternaliste, ces familles sont un cordon de protection très efficace contre la curiosité, et les protestations, des «étrangers» à l'usine. Les critiques restent lointaines. Et puis qui oserait attaquer trop