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Libération

L'effet cagnotte

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L'Etat supplée la carence du secteur privé.
publié le 19 novembre 2001 à 1h39

Le conflit Moulinex s'achève. Les salariés empocheront donc une «surprime» de licenciement, pour prix d'une vie professionnelle interrompue dans le drame de la faillite de leur entreprise. Bientôt, ils seront sans doute oubliés, comme les ouvriers de Cellatex, toujours pas reclassés plus d'un an après la fermeture de leur usine. En revanche, le fait que l'Etat indemnise lui-même, en tout ou partie, des salariés licenciés risque bien de faire fleurir les revendications, donnant naissance à un «effet cagnotte». Que répondra le préfet du Calvados aux employés des entreprises sous-traitantes de Moulinex, qui exigeront à bon droit d'être traités, eux aussi, équitablement?

«Jospin a bien trouvé 3 milliards pour les cliniques privées, il peut bien trouver 300 millions pour les Moulinex.» Cette phrase de dépit, les journalistes qui ont visité les usines la semaine dernière l'ont entendue à l'envi. En cédant aux patrons du secteur médical privé, le gouvernement a ouvert à deux reprises la boîte de Pandore. Premièrement, puisqu'il paraît normal que des médecins vident les cliniques de leurs malades, prenant ainsi la santé des personnes en otage, il n'est pas moins légitime pour des ouvriers de menacer de mettre le feu à leur usine. Deuxièmement, c'est finalement à l'Etat de payer la surprime, de la même manière qu'il a consenti à ouvrir une enveloppe pour augmenter les salaires des infirmières du secteur privé. On pourrait dire que le gouvernement s'est mis tout seul dans cette galère,