«Imaginez que Coca-Cola veuille empêcher un parlementaire français de dire son sentiment à propos d'un conflit du travail dans une de ses filiales en France. Eh bien, c'est exactement ce que nous vivons, nous, salariés américains, de la part d'un groupe français.» Richard Besinger, syndicaliste de l'United Auto Workers (UAW), affilié à la principale confédération américaine, l'AFL-CIO, n'en décolère pas: comment le groupe Saint-Gobain, réputé pour son éthique sociale, peut-il à ce point méconnaître les principes de la démocratie américaine, au point de provoquer une polémique avec des membres du Parti démocrate, dont le sénateur Edward M. Kennedy?
Douteux. Saint-Gobain semble bien s'être mis dans un combat douteux. L'affaire commence en août 2001, lorsque est organisé un vote chez Saint-Gobain Abrasive, ex-Norton, dans la ville de Worcester (Massachusetts). L'enjeu est important: si la majorité des 850 salariés vote en faveur du syndicat UAW, l'entreprise devra négocier un contrat collectif avec lui. Saint-Gobain veut manifestement empêcher l'implantation syndicale. La direction a fait appel au cabinet Jackson Lewis spécialisé dans la lutte antisyndicale. Cela n'a pas empêché l'UAW de remporter de justesse le vote majoritaire des salariés de l'établissement de Worcester. Une victoire très symbolique: à l'heure du recul du syndicalisme aux Etats-Unis, parvenir à syndicaliser une usine est exceptionnel. Mais Saint-Gobain Abrasive, conseillé par Jackson Lewis, conteste le scruti