Et si la principale cause de la souffrance au travail venait de l'organisation même des entreprises ? Pour Philippe Davezies, ergonome et enseignant-chercheur au laboratoire de médecine du travail de la faculté de médecine de Lyon, les managers d'aujourd'hui sont rompus aux techniques de gestion et de communication mais ne connaissent plus la réalité du travail qu'ils supervisent. Au nom de la rentabilité, le contenu des tâches accomplies est laissé de côté et les salariés livrés à eux-mêmes. Certains en tirent satisfaction, d'autres en souffrent, beaucoup mettent en place des stratégies de résistance. Ex-médecin du travail, Philippe Davezies intervient dans les entreprises sur les questions de souffrance au travail.
Pourquoi estimez-vous que les modes actuels de management sont source de souffrance ?
Les organisations du travail sont en pleine déliquescence. La distribution des rôles a été inversée. Dans le modèle taylorien, quasi obsolète désormais, le travail venait d'en haut, le chef ordonnait, le salarié comme le client suivaient. Aujourd'hui, l'organisation du travail n'est plus pilotée par l'amont mais par l'aval. La pression vient du carnet de commandes, lequel fluctue sans cesse. La versatilité du marché complique la relation hiérarchie-salariés et modifie considérablement la position et le rôle de l'encadrement. Auparavant, le responsable était celui qui organisait techniquement le travail. Actuellement, il n'est plus en mesure de le faire. Il ne sai