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Libération

Salariés en toute franchise

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publié le 28 janvier 2002 à 21h49

Franchisés de tous pays, unissez-vous ! Les vrais prolétaires aujourd'hui ne sont pas forcément ceux qu'on croit. Un inspecteur du travail opérant il y a quelques années sur le Marché d'intérêt national de Rungis eut un jour la surprise de voir un manutentionnaire employé par un grossiste lui présenter des feuilles de paie baptisées «factures». Convoqué, l'employeur se défendit en expliquant qu'il s'agissait d'un travailleur indépendant avec qui il était en affaires. L'inspecteur du travail et l'Urssaf n'eurent pas de mal à lui montrer que la ficelle était un peu grosse.

Coursiers, travailleurs à domicile, tractionnaires routiers, commerciaux : combien sont-ils à avoir cru au mirage de l'indépendance avant de découvrir une réalité beaucoup plus sordide, celle de l'exploitation sans limite et sans protection sociale ?

Dans trois affaires opposant la société France -Acheminement à ses «franchisés», la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu le 4 décembre dernier trois arrêts concordants permettant de requalifier le contrat «commercial» en contrat de travail. Jusqu'ici les juges retenaient comme principe essentiel la subordination. Une abondante jurisprudence définit les critères permettant de l'établir : obligation d'exécuter des directives, de respecter des horaires, de travailler en un lieu imposé par l'employeur. Les sociétés exploitant des enseignes dans le cadre des contrats de franchise ont su habilement contourner cette notion de subordination pour développer leur