Porto Alegre envoyé spécial
C'est un chapiteau bleu nimbé d'étoiles dorées. Il y a là un petit millier de personnes. Au milieu, Dred, un «Afro-Américain», comme il se définit, interpelle la foule : «Il faut désormais penser en "nous" plutôt qu'en "je". Il faut être organisé, se battre pour le futur de nos enfants. Il faut faire de la politique, mais refuser celle des partis.» Autour, des hommes échassiers, des clowns en action, des échos d'un concert. Dred se lance dans une improvisation hip-hop : «Je veux boire l'eau de la vie/ Mais le monde tente de me glacer/ Avant de maîtriser le monde/ Maîtrisons-nous d'abord.» Une clameur le salue. «On ne dort pas, ou quand on peut», jette une Italienne, des poches sous les yeux. «On vit l'utopie dans la réalité», résume un sociologue argentin.
Hommage. Bienvenue au parc Harmunia, sommet alternatif dans le sommet alternatif de Porto Alegre. Un camp de jeunes s'y est établi : rebaptisé Carlo-Giuliani, en hommage au jeune Italien tombé sous les balles à Gênes. Ils étaient plus de 10 000 préinscrits avant le début du Forum social mondial (FSM). Ils sont près de 20 000, majoritairement brésiliens, mais avec des contingents venus, dit-on, de 50 pays. Il est minuit, samedi. Les militants déambulent entre les odeurs d'herbe et les piquets des tentes, les dazibaos et les drapeaux des minicommunautés. Une autre journée commence. Par familles politiques, groupes d'affinités, les jeunes néoradicaux sillonnent le parc, sur fond de happenings festifs