Ce matin, à 8 heures, Patrice Romano et Mohamed Moussi vont retrouver leur travail. Un emploi qu'ils avaient quitté en 1996, après avoir été licenciés par leur entreprise, Euridep, une filiale du groupe Total, spécialisée dans la peinture. Leur réintégration, une procédure exceptionnelle et rarissime, vient d'être imposée à la société par la justice après six ans de bataille.
Ménage. En 1995-1996, le groupe pétrolier Total décide de remettre de l'ordre dans sa division peinture. Cessions, regroupements et fusion avec le groupe anglais, Kalon, conduisent à la suppression de plus de 200 postes, sur plusieurs sites. Des emplois sont visés à Bobigny, à Montreuil ou à La Défense. Denis Etienne, délégué CGT qui a porté l'affaire devant la justice, dénonçait déjà à l'époque «la logique purement financière de la restructuration». Un premier plan social est annulé par la justice. Le deuxième, finalement adopté, sera lui aussi attaqué par le syndicat et son avocat, Me Brun. Celui-ci décide de mener le combat sur le terrain de la réintégration des salariés licenciés. Habituellement, dans le cas d'annulation de plans sociaux, les plaignants réclament «juste des dommages et intérêts», explique-t-il. «Mais, depuis l'arrêt Samaritaine de 1997 qui avait permis la réintégration, dans le magasin, de deux vendeuses après l'annulation par la justice d'un plan social, on savait qu'il y avait une brèche.»
Une bataille juridique épique s'engage. La plainte, à laquelle sont associés une soixantaine d