Sur le bureau, une pile de livres trahit l'auteur prolifique. A 71 ans, Toru Sekiya a publié une vingtaine d'ouvrages consacrés aux problèmes psychologiques des salariés japonais, dont deux best-sellers: l'un sur le «stress», publié dans les années 80, et l'autre sur la «malédiction des pères», édité l'an passé. Professeur à la prestigieuse université de Tokyo, conseiller depuis peu de plusieurs grandes firmes nipponnes, il se bat pour briser le tabou qui entoure les maladies psychiatriques d'origine professionnelle et a été l'un des premiers, au Japon, à prendre la parole pour dénoncer les effets pervers du culte de l'entreprise, sorte de «mère» de substitution pour les salariés amenés à sacrifier leur personne et leur famille.
Les cadres japonais sont-ils vraiment déboussolés?
Beaucoup le sont, mais tous ne développent pas de phobies chroniques. Les dépressions les plus graves concernent souvent des employés dont la situation personnelle ou familiale est problématique. Dans les années 80, pas mal de jeunes cadres prometteurs avaient ainsi épousé la fille de leur supérieur. C'était une garantie de promotion, une preuve de fidélité à l'entreprise. Vous imaginez leur désarroi et leur peur panique lorsqu'ils se retrouvent menacés de perdre leur emploi ou qu'ils doivent changer de job...
Comment réagit en général leur famille?
Ceux qui ont une vraie famille peuvent compter sur l'appui de leur épouse et de leurs enfants. Mais beaucoup de ces hommes n'ont qu'une famille virtuelle. Il