Kanpur (Inde), envoyé spécial.
Assise sur le seuil de sa petite échoppe, Ranjana sort délicatement son relevé de comptes, un petit papier vert qu'elle manie comme s'il s'agissait d'un véritable trésor. «J'ai déjà remboursé 3 000 roupies (70 euros) sur mon dernier emprunt, je n'en dois plus que 4 000 (95 euros). Je vais les rendre le plus vite possible, car les taux d'intérêt sont proportionnels à la rapidité de paiement, explique cette femme de 27 ans, qui n'a jamais mis les pieds à l'école. Après, je ferai un nouvel emprunt pour agrandir la boutique.»
Taux exorbitants. Installée dans la rue principale du petit village de Bhool, à 500 km à l'est de New Delhi, la boutique de Ranjana n'est pour l'heure qu'une petite plate-forme en plein air, surmontée de quelques étagères adossées à une maison. Mais aussi modeste soit-il, ce petit magasin de rue représente pour cette femme une nouvelle vie. «J'ai toujours vécu dans la misère, raconte-t-elle. Mon mari ne gagnait que 200 à 300 roupies (5 à 7 euros) par mois en vendant des cigarettes dans la rue. C'était notre seul revenu, et nous étions très endettés.»
Dans les campagnes indiennes, les pauvres n'ont souvent d'autre choix que d'emprunter à des usuriers pour subvenir à leurs besoins. Ceux-ci pratiquent des taux d'intérêt exorbitants (jusqu'à 120 %), et leurs clients sont acculés, le plus souvent, à payer d'éternels intérêts sans jamais parvenir à rembourser le capital d'origine. Un système qui peut aboutir au servage. Mais, il y a de