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Libération
Interview

«Vivre pour et non de l'humanitaire»

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publié le 23 avril 2002 à 23h08

Johanna Siméant et Pascal Dauvin, sociologues, animent à La Rochelle le Cahier (Collectif d'analyse de l'humanitaire international). Dans le cadre des travaux de ce collectif, lors d'entretien, ils publient le Travail humanitaire, les acteurs des ONG, du siège au terrain (Presses de Sciences-Po, avril 2002).

Quelle est la réalité du mouvement de professionnalisation de l'humanitaire ?

Le secteur se professionnalise massivement depuis la crise du Rwanda en 1994. A l'époque, les associations avaient fait de gros appels aux volontaires, et des gens peu expérimentés ont été envoyés sur le terrain, avec les conséquences que l'on sait. Depuis, les ONG ont décidé d'accentuer le recrutement sur des critères de compétences. Le développement du salariat a accompagné cette professionnalisation. Aujourd'hui, il n'est plus limité aux gens qui travaillent au siège des ONG. Même les expatriés sur le terrain peuvent être salariés ; c'est aussi un moyen de les fidéliser sur des missions plus longues. Et les bailleurs de fonds font pression pour que les associations recrutent des professionnels, garantie d'une bonne utilisation de l'argent. Les ONG expliquent que la bonne volonté ne suffit plus.

Cette salarisation des personnels humanitaires ne va pourtant pas de soi en France.

Dans les ONG anglo-saxonnes, en effet, on a moins de scrupules à parler salaires, voire à payer les gens au tarif du marché. En France, on reste sur une image des ONG qui vivent de la générosité des donateurs privés, de l'