Un jour, ils en ont eu assez de compter les disparus autour d'eux. Dans les maisons voisines et dans leurs familles, les absents étaient de plus en plus nombreux. Alors, l'été dernier, ils se sont rassemblés et ont créé l'Association des amis et familles des victimes de l'immigration clandestine (Afvic). Ils sont basés à Khouribga, leur ville natale, au centre-ouest du Maroc, à 130 km de Casablanca. Entre décompte macabre et aide aux familles, ils font, chaque jour, un travail de démystification pour lutter contre l'immigration clandestine. Car la jeunesse marocaine d'aujourd'hui n'a qu'une idée en tête : partir. Immigrer est devenu une obsession nationale.
En 2001, 720 cadavres ont été repêchés et identifiés des deux côtés du détroit de Gibraltar, selon l'Afvic qui a recoupé les chiffres des autorités marocaines et espagnoles. Mais on est sans nouvelles de milliers d'autres, dont on ne sait s'ils ont réussi à passer vivant de l'autre côté ou non. Principalement, des Marocains qui ont essayé de franchir les 13 km séparant leur pays de l'Espagne, le plus souvent dans des petites barques de pêcheurs appelées pateras. En une décennie, plus d'une centaine de milliers de Marocains auraient réussi la traversée interdite. «Les détecteurs infrarouges, les gardes-frontière, les barrières, n'arrivent pas à empêcher l'immigration clandestine», constate Hicham Rachidi, de l'Afvic. Du coup, son association mène «une guerre de Don Quichotte» pour tenter d'enrayer cette hémorragie.
Les indic