Soissons envoyé spécial
«Ici, c'est la route de Reims, bientôt on l'appellera la route de la misère.» Christian Chevallier, ouvrier imprimeur chez AR Carton, 198 emplois, regarde la rue qui s'en va vers le centre de Soissons. A gauche, BSL Industries, une grosse usine de chaudronnerie industrielle, 305 emplois, qui fermera le 25 mai. A droite, sa filiale, Berthier, 56 salariés, de la chaudronnerie aussi, en sursis jusqu'à demain. De l'autre côté de la ville, la chaudronnerie Pecquet-Tesson sera liquidée le 15 mai et licenciera 64 personnes.
623 emplois vont disparaître ce mois-ci dans l'agglomération de Soissons, 50 000 habitants, qui ne se remet pas de la disparition de Wolber, filiale de Michelin (450 salariés), en 2000. Mardi, les ouvriers des entreprises concernées ont bloqué les accès de Soissons. Des quatre points cardinaux de la ville montaient les volutes de fumée noire des pneus enflammés. Soissons s'est endormie : tous les commerçants ainsi que la mairie ont fermé leurs portes. Une sorte de SOS pour salariés abandonnés.
«Flambant neuve.» Car c'est bien le sentiment qui domine chez ces ouvriers. Ceux d'AR Carton se sentent des orphelins de l'Union européenne. L'imprimerie fabrique l'emballage de la lessive Paic ou de la bière Heineken. «Une usine flambant neuve, entièrement restructurée en 2001, avec des subventions en plus», se désole Alain Beaudon, délégué CGT. AR a perdu le contrat de Procter & Gamble, qui passe des appels d'offres mondiaux pour ses impressions. «La