Le scénario d'une conquête sociale d'envergure suivie d'un retour en arrière a un précédent. En 1936, le Front populaire instaure la semaine de 40 heures. Une avancée sociale dans un pays où la semaine de travail n'avait guère de limite. Mais cette mesure phare du Front populaire ne tiendra pas longtemps. Dès 1938, le principe est progressivement contourné, puis démantelé. C'est Paul Reynaud, qui succède à Léon Blum à la présidence du Conseil, qui donne le premier coup de boutoir. En novembre, il prend un décret-loi autorisant la multiplication des heures supplémentaires, peu payées d'ailleurs, et permet d'organiser la semaine de travail sur six jours. La CGT tente de s'y opposer et de violents affrontements ont lieu avec la police, notamment chez Renault. Mais plus que le décret Reynaud, c'est la guerre qui modifie la donne, comme le relèvent François Guedj et Gérard Vindt (1) : le régime de Vichy porte à 60 heures la durée maximale du travail, ouvrant la voie à un net allongement de sa durée effective, entre 1940 et 1943. Non seulement l'occupant nazi stimule la production, mais il trouve du répondant auprès des entreprises françaises.
Ce retour en arrière n'a rien d'une parenthèse. La tendance se confirme après la Libération, alors que la nécessité de reconstruire le pays rencontre un large consensus. Certes, la loi de 1946 rétablit les 40 heures hebdomadaires, la mesure du Front populaire, mais le pays a besoin de bras. Le gouvernement facilite donc largement le recours a