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Libération

«Zut, on n'est pas virés!»

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publié le 21 mai 2002 à 23h32

Guy est ouvrier spécialisé. Il attendait la vente de l'usine pour être licencié. Déception, l'acheteur a renoncé.

«Je suis ouvrier fritteur dans une usine de joints en céramique, c'est-à-dire que je mets les joints au four pour les faire cuire. Je fais les trois-huit, ce matin je suis rentré du boulot à 6 heures du mat. J'aime bien, la ville s'éveille et puis la nuit pour le boulot, c'est plus tranquille que la journée, il y a moins de pression du contremaître.

Depuis un an, nous avons un nouveau chef qui fait régner la terreur. Il s'est fait virer d'une autre usine parce qu'il mettait trop la pression, c'est une sorte de tueur. Certains pensent qu'il a été nommé là pour faire partir les gens, que c'est calculé par la direction. Du haut de ses 30 ans, il veut en remontrer à des ouvriers qui sont là depuis plus de trente ans. Les vieux écarquillent les yeux devant le langage technocratique de ce "tueur" sorti d'une école mais sans connaissance du terrain.

Quand, dans cette ambiance, on nous a parlé d'un rachat de l'usine par un groupe étranger, avec le licenciement de 75 % du personnel, nous étions beaucoup à être ravis. Nous espérions partir avec une prime, un peu de chômage et une possibilité de reconversion. En janvier, nous sommes tous allés au siège de la boîte pour manifester, savoir ce qu'ils allaient faire de nous. On a perdu une journée de boulot et on n'a rien su du tout.

La semaine dernière, l'acheteur a décidé de ne plus nous racheter. Même les délégués syndicaux n'ét