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Libération

Quand tombe le voile.

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publié le 11 juin 2002 à 23h54

Leila, 35 ans, est vendeuse dans un magasin de vêtements de luxe à Cannes.

«A la boutique, plus on fait de chiffre, plus on est payé. Quand on gagne le jackpot, le patron paye le champagne. Ici, la robe la plus basique coûte 1 000 euros. Moi, je touche entre 1 220 et 1 830 euros par mois, sans compter mes heures et en dépensant toute mon énergie pour vendre.

Rester les bras croisés à papoter et à observer les clientes dans les rayons, ça ne le fait pas du tout. Telles des guerrières, dès que l'une d'elles s'approche d'un cintre, on lui saute dessus. Et dès qu'elle essaye un vêtement, c'est l'exclamation hypocrite qui emplit la boutique. Parfois, c'en est ridicule tellement le vêtement lui va mal, il la boudine ou simplement la couleur lui brouille le teint.

Moi, je fonctionne différemment, je préfère être sincère. Du coup, j'ai mes clientes. Certaines d'entre elles s'achètent un vêtement par semaine, il est donc indispensable que je les fidélise. Leurs maris aussi, car c'est eux qui tiennent le porte-monnaie, et certaines femmes doivent user de tous leurs charmes pour faire sortir le chéquier.

Je suis perçue comme une bonne vendeuse par les patrons, mais les autres vendeuses n'apprécient pas toujours que j'aie mon cercle de clientes. Et pour elles, comme je suis d'origine arabe, il n'y a que les clientes arabes qui viennent pour moi, ce qui n'est pas dit sans une pointe de mépris de leur part. Le paradoxe, c'est qu'une bonne part de notre clientèle vient du monde arabe. De riche