Encore tabou, le travail «sous influence» existe bien. Pour la première fois une enquête de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, (OFDT), que Libération s'est procurée, explore ces pratiques souvent cachées, en tout cas jamais revendiquées sur le lieu de travail. Elle permet de battre en brèche certaines idées reçues, sur les comportements comme sur les produits. Ainsi l'usager habitué à gérer sa consommation aura plutôt tendance à redoubler de vigilance à son poste par peur de se faire attraper, pour préserver son statut social et son estime de soi. Et la cocaïne n'a de la performance que l'image : elle donne l'illusion d'améliorer ses capacités et ne s'avère efficace que pour les «travaux physiques». «Par ailleurs les drogues licites comme l'alcool, les médicaments psychotropes et le tabac restent les substances les plus fréquemment rencontrées», rappelle Astrid Fontaine, socio-ethnologue au laboratoire de recherche autonome sur les sociétés, auteur de cette étude.
Tout milieu concerné. Basé sur 41 entretiens anonymes d'«usagers de drogues intégrés en milieu professionnel», ce travail a été réalisé dans le cadre du dispositif «Trend» (1) de l'OFDT consacré aux phénomènes émergents. Agés de 23 à 49 ans, ces 34 hommes et 7 femmes travaillent et prennent des drogues illicites. Mais comme ils n'ont jamais eu maille à partir avec la justice, ni recours à des structures de soins, ils constituent une population «cachée» ou plutôt indétectable. Quatre enquêteurs