Tout a commencé par une odeur entêtante d'herbe qui flottait près des lavabos. Puis, à la relève des équipes de nuit et de jour, les salariés ont commencé à remarquer les effluves de cannabis. «A ce moment-là, on a su que les jeunes de la nuit fumaient, raconte une salariée de cette usine métallurgique de l'est de la France. Les chefs ont commencé à traîner pendant la nuit pour les coincer, mais ils ne les ont jamais pris sur le fait.»
La banalisation de la consommation de cannabis chez les moins de 30 ans est un fait. A 19 ans, un jeune sur six déclare fumer un joint quasi quotidiennement (1). Aujourd'hui, cette banalisation touche le monde du travail, avec l'arrivée des nouvelles générations. La vague d'embauche des années 1997-2000 a fait pénétrer d'un coup les jeunes gens dans les entreprises. Et le cannabis inquiète les salariés les plus âgés. «L'alcool, les gens qui boivent, on sait comment ça fait, explique un chef d'atelier dans la plomberie industrielle. Les jeunes qui fument, je ne sais pas si c'est dangereux ou pas. Est-ce que je dois les sanctionner pour fumette, ou est-ce que je dois attendre qu'ils aient un accident pour les mettre à la porte ?» L'alcool au travail est un fléau reconnu et combattu par des politiques de santé publique. Avec parfois des résultats mitigés. Le cannabis lui, prohibé au travail comme dans le «civil», ne fait l'objet pour l'instant d'aucune évaluation. Et ses risques en terme de dangerosité au travail sont inconnus (lire page II). Mais