Douvrin envoyée spéciale
C'est un morceau de papier qui n'aurait pas dû arriver jusque-là. Une main anonyme l'a déposé en novembre dernier dans la boîte aux lettres du local CGT de la Française de Mécanique, l'immense filiale de Renault-PSA qui emploie 6 000 salariés à Douvrin dans le Pas-de-Calais. Sur cette feuille, sortie du fichier informatique d'un cadre de l'usine, quarante-deux noms, ceux des ouvriers du département «affûtage». Dans les cases de ce tableau à double entrée, ils ont été classés en fonction de leur motivation, de + 4 à - 4, selon qu'ils étaient «engagés», «coopératifs», «intéressés», «minimalistes», «conciliants», «résistants», «opposants», ou carrément «irréconciliants». En bas à droite du tableau, les «minimalistes irréconciliants», tous des syndicalistes, de trois centrales différentes. Et en haut à gauche, un seul «engagé conciliant». Les cégétistes ont bondi d'autant qu'un précédent de «fichage» avait été dénoncé un an plus tôt à l'usine Renault du Mans.
Initiative personnelle. «Une erreur humaine», plaide la direction. N'empêche. Début janvier 2002, la CGT, majoritaire dans l'usine, porte plainte pour infraction à la loi Informatique et Libertés. «La Française de Mécanique n'est pas au-dessus de la loi», argumente Alain Labarre, secrétaire général de la CGT. Aucun autre syndicat ne le suit. Le 19 juin, Marie-Caroline de Boissac, juge d'instruction à Béthune, délivre une commission rogatoire, et une enquête est ouverte. Depuis lundi, l'usine de Douvri