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Libération

«Charlots des temps modernes»

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par Mélina GAZSI
publié le 14 octobre 2002 à 1h24

Betty, 34 ans, conductrice de machines dans une usine de viennoiserie industrielle.

«Depuis que je suis conductrice de machines, mon travail est moins épuisant physiquement mais, nerveusement, c'est pas mieux, presque pire... Responsable d'une équipe de six personnes au conditionnement, sur une piste de production de 50 mètres, je m'occupe du montage des bobines sur les mandrins, vérifie les réglages selon les produits et veille aux commandes des magasins. Alors, au repos, bien sûr, je sens les contrecoups des énormes charges que je tire, des palettes de près de deux mètres de hauteur remplies de cartons à ras bord... Mais c'est surtout le stress qui m'empêche de dormir la nuit.

«Sur ma machine, je n'ai qu'un souci en tête : garder la cadence car, à chaque changement de produit, j'arrête la ligne. Cela consiste à changer les bobines et les fils et à réactiver très vite la chaîne avec le nouvel emballage du nouveau produit. Un rythme éreintant pour les aides au conditionnement qui travaillent en tandem et doivent enchaîner emballage sur emballage sans se tromper, ramasser les derniers paquets avant les changements... Avec toujours le même tempo : 200 coups, 200 brioches à mettre en paquets à la minute. Douze à quinze mille pièces emballées par heure.

«Un rythme impossible à tenir pour les intérimaires que l'on embauche pourtant ici à tour de bras. Et les 35 heures n'ont rien arrangé. Généralement, on fait les 3/8, quinze jours de nuit et quinze jours de jour, une semaine sur deu