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Libération

Le cheminot vire au rouge

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publié le 28 octobre 2002 à 1h34

Conseil de prud'hommes de Créteil,

section commerce

L'avocate n'hésite pas à mimer la scène. «Le 31 décembre 2000, mon client ramène un train en gare d'Austerlitz. Il s'arrête à un feu. Le feu devient blanc ­ ce qui, pour les trains, veut dire vert. Il remet le convoi en mouvement. Et là, une procédure de freinage automatique se déclenche, sa machine est arrêtée.» L'avocate se raidit. Murmures dans la salle. Une quinzaine de cheminots sont assis sur les bancs, venus soutenir leur collègue. Joël L., en jean et chemise clair, la trentaine, attaque son employeur, la SNCF. Après «l'incident du réveillon», il a été suspendu de ses fonctions de conducteur de train. «Mon client a une activité militante importante à la CFDT», poursuit l'avocate. «Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage. On reproche à M. L. d'avoir grillé un feu, alors que, vraisemblablement, il y a eu un bogue. Puis, on le convoque à une visite médicale, et il reçoit un avis d'inaptitude à la conduite. Le problème, c'est que l'inspection du travail a mandaté un second médecin, qui l'a déclaré totalement apte.» L'avocat de la défense s'étrangle : «Le souci de la SNCF est la sécurité de ses usagers.» Le président prend un ton jovial. «Le médecin du travail le déclare apte, et évoque dans son rapport des "pressions de la direction" pour l'écarter du poste de conducteur. Qu'est-ce que vous répondez ?» L'avocat : «Je ne réponds pas, je ne suis pas au courant. C'est dans l'intérêt des usagers que...» Le président : «Bo