Entretien avec Jérôme Creel, spécialiste des questions économiques européennes à l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques).
La baisse des taux peut-elle relancer l'économie européenne ?
C'est une bonne nouvelle. Mais cette baisse confirme la contradiction croissante entre les objectifs des politiques monétaire et budgétaire, la première étant pilotée par la Banque centrale européenne, la seconde par les Etats. Cette configuration a donné lieu à ce qu'on appelle, sérieusement, en théorie des jeux, «la poule mouillée».
Qui est la «poule mouillée» ?
Imaginez deux conducteurs de voitures qui foncent l'un vers l'autre. Celui qui dévie le premier de sa trajectoire est une poule mouillée. Si personne ne dévie... c'est le crash. Eh bien, cette situation illustre la constitution économique de la zone euro. En présence de plusieurs gouvernements et d'une Banque centrale aux objectifs différents, l'obstination de chacun des deux blocs à atteindre son objectif mène au crash.
Là, qui s'est dégonflé le premier ?
On a imposé aux gouvernements de ne pas poursuivre les politiques économiques qui auraient pu favoriser la croissance et la lutte contre le chômage. Pour éviter une politique budgétaire trop expansionniste et une politique monétaire trop restrictive, on a fait prévaloir la politique monétaire et son objectif de stabilité des prix sur la politique budgétaire et son objectif de croissance. Tel est l'équilibre dans lequel les gouvernements ont accepté de se placer, notamm