C’est un truc de métier, les typographes appellent ça «monter par le cul» (page 284) pour dire qu’on peut composer un article en commençant par la fin, mais ça ne se fait plus, et la typo est un boulot qui aura bientôt disparu. Commençons par le début. Comme toutes les bonnes idées, souvenez-vous, Archimède, celle-ci est née dans une salle de bains, un matin de 1989, en se rasant, Pierre Perret, chanteur, passe le nez par l’entrebâillement de la porte : «Rebecca, j’ai une idée.» Pierre Perret sait qu’il peut compter sur sa femme Rebecca. Il ne s’en prive pas. L’idée c’est de faire un dictionnaire des mots puisés dans le vocabulaire des métiers, des expressions, des inventions populaires, pas de l’argot, non, de ce français familier qu’on partage entre gens du même monde, qui permet de s’identifier comme galérien de la même galère, clients de la même boutique, des mots qu’on n’écrit pas, qu’un inconnu du bâtiment invente un jour, des mots qu’on entend, qu’on reprend quand ils ont du talent, qui font leur trou dans la vie des gens mais rarement dans les dictionnaires puisque ces mots-là sont vivants, pas couchés les pieds devant sur du papier glacé.
Rebecca dit «banco» et pense in petto qu'on n'est pas sorti d'affaire. Pierre Perret vient d'être bombardé par Michel Rocard à un machin officiel, genre conservatoire de la langue française, il prend ça au sérieux, on ne rigole pas avec l'outil de travail, et pour Perret, la langue française, c'est du boulot, c'est avec ça qu'il fai