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Libération
Reportage

Inde, la voix de l'Amérique

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Sous-traitants d'entreprises américaines, des centres d'appels indiens forment leurs salariés à répondre comme de parfaits Américains,accent compris. Pour donner aux clients l'illusion de la proximité. Reportage à New Delhi.
publié le 20 janvier 2003 à 21h54

New Delhi de notre correspondant

«Bonjour, ici Alfred, que puis-je faire pour vous ?» La voix, en anglais, est quasi mécanique, l'accent légèrement américain. «Bonjour, c'est Grace, j'appelle de New York. Je voudrais activer mon nouveau téléphone portable», répond une voix féminine. «Pas de problème, madame, puis-je avoir votre numéro de Sécurité sociale ?», rétorque le jeune homme en forçant un peu l'accent. Grace s'exécute tandis qu'Alfred, son casque-micro vissé sur le crâne, pianote sur son ordinateur. Un quart d'heure plus tard, le portable new-yorkais de Grace est opérationnel. «Merci et bonne journée», conclut Alfred.

Pas une seconde la cliente américaine ne s'est doutée que son interlocuteur se trouvait à l'autre bout du monde. Alfred est en effet Ashish, un Indien de 23 ans qui n'a jamais mis les pieds aux Etats-Unis. Il répondait depuis Gurgaon, ville nouvelle située en lisière de New Delhi. Et contrairement à ce que croit Grace, il ne travaille pas pour Sprint, la marque de son nouveau portable, mais pour Daksh eServices, une entreprise 100 % indienne à qui le numéro 1 américain de la téléphonie mobile sous-traite son service clientèle.

Lorsqu'il souhaite bonne journée à son interlocutrice, Ashish-Alfred joue un rôle bien appris. Pour lui, c'est la nuit noire, décalage horaire oblige. Quant à l'accent américain, il est le fruit d'un long apprentissage fourni par son employeur. «Chaque conversation est un tour de passe-passe, sourit le jeune homme, redevenu Ashish ent