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Libération

L'organisation du travail, coupable potentiel

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Médecins et chercheurs manquent de moyens pour enquêter, et donc prévenir.
publié le 3 février 2003 à 22h06
(mis à jour le 3 février 2003 à 22h06)

C'était samedi, il y a dix jours. Une femme de 44 ans, mère de quatre enfants, s'est jetée d'un pont près de Nice. Depuis dix ans, elle travaillait à la direction financière d'une grosse société informatique. Dans une lettre laissée à son mari et ses collègues, elle met en cause son entreprise, évoquant un «manque de respect et d'intelligence humaine, des humiliations, des souffrances morale». «J'arrête tout, car je ne pense pas qu'une amélioration soit possible.» Le président de la société a rejeté les accusations mais diligenté une enquête, les syndicats sont restés muets. Par écrit, la victime leur demande pourtant de saisir les prud'hommes afin de requalifier son geste en suicide professionnel.

Dans cette fabrique de chaussures, le drame est arrivé il y a un an. Un ouvrier s'est donné la mort aux portes de l'atelier, d'un coup de carabine. Lui aussi met en cause, dans une lettre, la direction, les syndicats, la Sécurité sociale qui refusait de reconnaître son mal aux poumons comme maladie professionnelle. «On ne peut accuser ni le travail ni le patron. Ce n'est pas si simple», soutient un collègue. «Il avait sa maladie, et sa copine faisait une dépression.» Puis il raconte: «Ce type a connu la dure. Il est rentré à l'usine à 14 ans. A l'époque, il faisait 60 heures par semaine, six jours sur sept, payé au rendement.» L'entreprise a mis en place une cellule psychologique. «A part trois collègues, personne n'y est allé, même ceux qui ont découvert le copain à côté de l'usin